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1 avril 2007 7 01 /04 /avril /2007 11:19

Voici un livre grinçant, burelesque, terrible, poétique, cruel. On y retrouve les personnages chers à Tim Burton, petits frères d'Edward aux mains d'argent ou de Jack (de l'étrange Noël de Mister Jack). On y lit de courts récits/comptines/poèmes. L'éditeur a eu la bonne idée de mettre face à face le texte original et la traduction. Moi qui suis nulle en anglais, j'ai pris plaisir à lire les textes originaux, très courts et simples, qui sont moins tarabiscotés que la traduction et d'autant plus forts.

Chaque texte est illustré par des dessins de l'auteur, souvent en noir et blanc, avec des personnages à la grosse tête, aux yeux globuleux et au corps filiforme.

On y croise donc essentiellement des enfants différents, monstrueux : un enfant robot, un enfant avec des clous dans les yeux, un enfant tache, un enfant momie, tête de melon, un bébé ancre ... L'enfance pour Tim Burton n'est pas un monde rose et ouaté et leur destin est souvent tragique.

Voici une des plus courtes, en anglais puis traduit :

The Pin Cushion Queen

Life isn't easy

for the Pin Cushion Queen.

When she sits on her throne

pins push through her spleen.

La Reine Pelote-à-Epingles

La vie n'est pas drôle pour cette haute magistrate,

La Reine Pelote-à-Epingles : quand

sur son trône elle pose son séant,

les épingles lui ratatinent la rate.

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6 juin 2006 2 06 /06 /juin /2006 16:09
 
Orion est un adolescent âgé de treize ans. Il est tout chambardifié par les rayons du démon de Paris ce qui peut l’amener à être violent. A l’hôpital de jour, Véronique devient sa « psycho-prof un peu docteur » et petit à petit, elle fait connaissance avec le monde d’Orion et son langage si particulier : l’enfant bleu, l’île Paradis numéro 2, les dictées d’angoisse, les trois cents chevaux blancs de la Vierge de Paris, le cri de la petite fille sauvage … Nous suivons cette relation thérapeutique et amicale sur une dizaine d’années au moins. Véronique ressent très vite le talent artistique d’Orion et l’entraîne dans cette voie ; il aura par la suite sa carte de visite : « Orion, artiste peintre et sculpteur ».
         Je suis tout de suite rentrée dans ce livre qui a une force et une puissance d’images incroyables. On pénètre à la fois dans l’univers et le mystère du handicap et de la différence mais également dans celui de la création.
 
« Dictée d’angoisse numéro un
J’admire. Quel titre ! Jamais je n’aurais pu formuler cela de façon aussi juste. Déjà il reprend :
En partant ce matin, on a tout de suite été bazardé, l’autobus n’était pas à l’heure et quand il arrivait il s’arrêtait tout près de moi en aboyant comme s’il allait mordre. On a pensé que papa aurait dit qu’il ne peut pas aboyer car c’est un autobus et pas un chien… tout de même il aboyait et même il voulait me mordre mais il ne l’a pas fait. Alors on pensait qu’on allait mettre le feu au Centre pour ne plus avoir à attendre l’autobus et prendre le métro. (…) Pour ne plus incendier il vaut mieux qu’on parte en dessin sur une île.(…) Quand on ne sait plus où on est au milieu de l’Océan, Bernadette prend le livre du commandant du navire et elle lit des passages. Avec bon vent et pas de naufrage, car le démon a peur de traverser la mer, on arrive à l’île Paradis numéro 2. C’est une île qui est dans le réel de la tête mais pas encore dans le dessin. Une île déserte avec plein de fruits, des grottes, des palmiers et une rivière où on peut pêcher des truites naturelles. Fin de dictée d’angoisse sinon on va dépasser l’heure. »
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19 février 2006 7 19 /02 /février /2006 10:56
Je continue dans mes petits préférés de mon adolescence (et plus !) et il y a bien sûr le grand Boris Vian, l’écrivain, le trompettiste, le poète, le pataphysicien, le chanteur, le zazou, …que j'ai découvert pour la première fois en troisième, tiens, avec la même prof que celle qui m'a fait découvrir Antigone ! Vive l'éducation nationale ! Je suis entrée dans son oeuvre en lisant, comme beaucoup, l'Ecume des jours, oeuvre poétique s'il en est ! C'était la première chose de ce genre que je lisais et j'en suis restée émerveillée :
 le pianococktail, Isis Colin Chloé et Chick, le nénuphar de Chloé, les doublezons, Chloé arrangée par Duke Ellington, le suicide de la souris la tête dans la gueule du chat  qui laisse traîner sa queue sur le trottoir alors qu'arrivent "en chantant, onze petites filles aveugles de l'orphelinat de Jules l'Apostolique", Colin qui se taille les paupières en biseau "pour donner du mystère à son regard" ...
J'ai alors acheté tout ce que Boris Vian avait pu écrire (j'exagère un peu, pas tout !), notamment "l'arrache-coeur" qui m'avait beaucoup impressionnée avec cette mère plus que possessive !
Mais j'ai surtout pris un très grand plaisir avec ses poèmes et chansons. Nous passions des soirées entières avec mon meilleur copain à chanter du Vian, lui étant au piano, jusqu'à 2 ou 3 h du matin. On a notamment beaucoup déliré avec "Fais-moi mal Johnny".
Il s'est levé à mon approche
Debout, il était bien plus p'tit
Je me suis dit c'est dans la poche
Ce mignon-là, c'est pour mon lit
II m'arrivait jusqu'à l'épaule
Mais il était râblé comme tout
II m'a suivie jusqu'à ma piaule
Et j'ai crié vas-y mon loup

Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Envoie-moi au ciel... zoum !
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Moi j'aim' l'amour qui fait boum !
 
 
 
 
 
 
On chantait tous les classiques : la java des bombes atomiques (Mon oncle un fameux b ricoleur, etc), la complainte du progrès, le déserteur, j’suis snob et tant d’autres…
Mais ces poèmes aussi me touchaient beaucoup :
 
L’évadé

Il a dévalé la colline
Ses pieds faisaient rouler des pierres
Là-haut entre les quatre murs
La sirène chantait sans joie

Il respirait l'odeur des arbres
Avec son corps comme une forge
La lumière l'accompagnait
Et lui faisait danser son ombre
 
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il sautait à travers les herbes
Il a cueilli deux feuilles jaunes
Gorgées de sève et de soleil
 
Les canons d’acier bleu crachaient
De courtes flammes de feu sec
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il est arrivé près de l’eau
 
Il y a plongé son visage
Il riait de joie, il a bu
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Il s’est relevé pour sauter
 
Pourvu qu’ils me laissent le temps
Une abeille de cuivre chaud
L’a foudroyé sur l’autre rive
Le sang et l’eau se sont mêlés
 
Il avait eu le temps de voir
Le temps de boire à ce ruisseau,
Le temps de porter à sa bouche
Deux feuilles gorgées de soleil
 
Le temps de rire aux assassins
Le temps d’atteindre l’autre rive
Le temps de courir vers la femme
 
Il avait eu le temps de vivre
 
Je crois que c’est mon poème préféré. On y trouve la vie telle que nous devons tous la vivre. Lui savait qu’  « une abeille de cuivre chaud » allait le toucher un jour ou l’autre (il est mort à 39 ans).
            Mais j’adore aussi ses poèmes complètement dingues :
Florilège :
«Un jour, il y aura autre chose que le jour
Une chose, plus franche que l’on appellera le Jodel
Une autre translucide comme l’arcanson
Que l’on s’enchâssera dans l’œil d’un geste élégant (…) »
 
« Tout a été dit cent fois
Et beaucoup mieux que par moi
Aussi quand j’écris des vers
C’est que ça m’amuse
C’est que ça m’amuse
C’est que ça m’amuse et je vous chie au nez. »
 
« Je voudrais pas crever
Avant d’avoir connu
Les chiens noirs du Mexique
Qui dorment sans rêver
Les singes à cul nul
Dévoreurs de Tropiques (…)»
 
Allez, pour finir, un extrait d’une chanson que je chantais le matin en allant au bahut pour me mettre de bonne humeur :
 
L'autobus vous passe sous le nez
Un' grosse dame vous marche sur les pieds
Votr' petite amie s'envole
Avec ce salaud de Paul
En laissant des cheveux plein l'évier
Au bistro, le café n'est pas bon
Au bureau, ça ne tourne pas rond
Et votre meilleur copain
Au lieu d'avoir du chagrin
II se marre et vous traite de... tsoin... tsoin... tsoin...

Ah, comme la vie serait triste
Triste, triste, triste
Ah comme la vie serait triste
Si l'on ne pouvait pas chanter
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2 janvier 2006 1 02 /01 /janvier /2006 22:19

 

Borgès, les labyrinthes, des mondes fantastiques, des personnages doubles tel Janus, des « jardins aux sentiers qui bifurquent », des univers oniriques, des langues inconnues, des mystères, des paradoxes, des rêveurs qui sont eux-mêmes les rêves d’autres rêveurs, bref, des mondes fascinants.

Je parlerai ici plus particulièrement d’une de ses fictions intitulée « la bibliothèque de Babel ». Cette bibliothèque extraordinaire est une bibliothèque infinie, qui contient tous les livres que l’on peut écrire en combinant les lettres de l’alphabet. Cela signifie une infinité de livres n’ayant aucun sens apparent (mais peut-être en a-t-il un si on sait le décoder, si l’on trouve l’idiome dans lequel il est écrit, par exemple « un dialecte lituanien du guarani, avec des inflexions d’arabe classique ») mais aussi tous les livres qui ont été écrits ou tous les livres qui vont être écrits.

« Tout : l’histoire minutieuse de l’avenir, les autobiographies des archanges,(…), l’évangile gnostique de Basilide, le commentaire de cet Evangile, le commentaire du commentaire de cet Evangile, le récit véridique de ta mort,la traduction de chaque livre en toutes les langues, (…) »

Cela a donc suscité un espoir immense, mais dans un second temps un désespoir tout aussi immense devant la tâche à accomplir pour trouver quelques phrases compréhensibles.

 

Cette mise en abyme m’avait émerveillée lorsque j’avais lue cette nouvelle, d’autant que j’ai toujours eu un grand amour pour les bibliothèques. Alors là, LA bibliothèque, c’était magique. En lisant ce texte, j’ai en tête les magnifiques bibliothèques peintes par l’artiste Maria Vieira da Silva que j’aime tant et qui me paraissent en totale adéquation avec cette histoire. Petite, je rêvais que je nageais dans une mer de livres, que je n’avais qu’à tendre la main pour trouver un nouvel ouvrage, et c’était le bonheur.

 

A contrario, je pense aussi au célèbre « Fahrenheit 451 » de Ray Bradbury, filmé par Truffaut, et qui décrit un monde où les livres sont brûlés, où des résistants apprennent par cœur un livre pour pouvoir le transmettre par oral aux autres.

 

Il faut découvrir Borgès, chaque nouvelle est tout aussi étonnante et envoutante.

 

 

 

 

 

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29 décembre 2005 4 29 /12 /décembre /2005 19:34
Je voudrais aujourd’hui écrire quelques mots sur Antigone, un personnage qui m’a toujours fascinée. Une prof, lorsque j’étais en troisième, nous avait fait découvrir l’Antigone d’Anouilh et cela a été un de mes premiers coups de foudre littéraires.
 
Résumons brièvement d’abord l’histoire d’Œdipe. Un oracle prédit au roi Laïos et à la reine Jocaste que leur fils tuerait son père et épouserait sa mère. Pour éviter ce destin funeste, Laïos décide d’abandonner son fils nouveau-né. Celui-ci est recueilli par des bergers qui le confient à leurs maîtres. Ceux-ci élèvent Œdipe comme leur fils. Lorsque celui devint adulte, il apprit par hasard qu’il a été recueilli ainsi que la sinistre prophétie. Il part alors consulter l’oracle. En chemin, il tue en s’emportant un vieillard inconnu (qui n’est autre que le roi Laïos, son père). Arrivé près de Thèbes, il résout l’énigme du sphinx et libère ainsi la ville de ce terrible monstre. Les Thébains reconnaissants l’élirent roi et lui donnèrent comme épouse la reine Jocaste qui est veuve. La seconde partie de la prophétie s’accomplit alors. Le couple ignorant de tout ceci vit heureux. Ils eurent deux fils, Etéocle et Polynice et deux filles, Ismène et Antigone. Des années plus tard, ils finissent par apprendre l’atroce vérité. Jocaste désespérée se suicide et Œdipe se crève les yeux. Aveugle, il fera alors guidé par la fille Antigone.
 
            L’histoire d’Anouilh commence après la mort d’Œdipe. Elle est bien sûr basée sur celle de Sophocle qui lui, centrait plutôt son intrigue sur Créon, l’oncle d’Antigone.
            Lors d’une guerre, les deux frères s’entretuèrent. Créon, frère de Jocaste et alors roi de Thèbes, décide de célébrer des funérailles grandioses pour Etéocle alors que Polynice, considéré comme un traître serait laissé sans sépultures. Antigone se révolte contre les lois humaines et décide de réaliser les lois divines, donc d’enterrer  son frère, même si elle doit être pour cela punie de mort.
 
            J’avais été frappée par le prologue omniscient qui présente les différents personnages qui sont sur scène. Voici le début de la pièce : « Voilà. Ces personnages vont vous jouer l’histoire d’Antigone. Antigone, c’est la petite maigre qui est assise là-bas, et qui ne dit rien. Elle regarde droit devant elle. Elle pense. Elle pense qu’elle va être Antigone tout à l’heure, qu’elle va surgir soudain de la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille et se dresser seule en face du monde, seule en face de Créon, son oncle, qui est le roi. » . Un autre extrait où Antigone répond à Ismène qui lui demande Si elle n’a pas envie de vivre : « Pas envie de vivre… (Et plus doucement encore si c’est possible.) Qui se levait la première , le matin, rien que pour sentir l’air froid sur sa peau nue ? Qui se couchait la dernière seulement quand elle n’en pouvait plus de fatigue, pour vivre encore un peu de la nuit ? Qui pleurait déjà toute petite, en pensant qu’il y avait tant de petites bêtes, tant de brins d’herbe dans le pré et qu’on ne pouvait pas tous les prendre ? »
 
Voilà, et tant d’extraits encore mais je ne suis pas vraiment sûre d’en avoir le droit alors j’arrête.
 
Bref, j’aime cette petite révoltée amoureuse de la vie, un peu trop fière, différente et touchante.
 
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